Médiathèque de Saint Savournin

Comme une envie de... médiathèque

La table de nuit de la bibliothécaire

La déménagerie / Jean-Loup Trassard

 

En 1941 - donc sous l'Occupation - une famille de cultivateurs, sept enfants, quitte sa petite ferme pour une grande à cent dix kilomètres de là : préparatifs, voyage sur des charrettes, installation... A l'échelle bocagère, une sorte de Ruée vers l'Ouest ! Maître de champs plus vastes, Victor s'augmente lui-même sous les regards d'autres paysans et sa famille ressemble à celle des pionniers, sans que soit perturbée jamais l'entente avec Marguerite. Nous sommes alors au cœur d'une ferme, lieu rarement exploré par la littérature, et les intempéries mémorables se mêlent aux travaux agricoles, tandis que vivement défile toute la vie rurale en cette période troublée, avec nombre de figures villageoises, ou animales, puis les événements de la Libération, et encore le mariage des filles... [4ème de couverture]

Jean-Loup Trassard a écrit de nombreux textes : romans, nouvelles, essais, recueils de photographies... Toute son œuvre est tournée vers le monde de rural qu'il observe avec le regard de l'ethnologue et du poète. Son écriture est riche d'une langue française classique admirablement maîtrisée à laquelle s'ajoute le "parler" et le patois de ses personnages. Il nous fait revivre ou découvrir la vie paysanne au XXème siècle, ces vies laborieuses qui rendent les hommes taiseux et épuisent les femmes, la solidarité et les mesquineries dont ils peuvent faire preuve et la présence d'une nature belle et généreuse, mais aussi brutale et impitoyable.

Ça s’est passé vite – enfin… dire très lentement ne serait pas faux non plus –, Victor debout près des charrettes, paralysé par la colère, conducteurs et femme Jarrier en concertation muette, les deux gars à mi-chemin, serré à la porte ou déjà sur les marches le reste de la famille Fourboué, au seuil de la remise le commis. Il ne reconnaît plus la tête de Jarrier où la colère aussi, et l’audace qu’elle donne plissent les yeux, le défigurent sous sa casquette que l’eau traverse jusqu’au crâne précocement dégarni. Victor soudain se tourne, grands pas vers Marguerite : Côme Victor Clément courez après les juments, prenez des liens ! Vous autres rentrez à la maison et vous clavez la porte ! Je vais chez le propriétaire.

La déménagerie / Jean-Loup Trassard

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