24 Mars 2021
En rêve
je peins comme Vermeer de Delft.
Je parle couramment le grec
et pas seulement aux vivants.
Je conduis des voitures
qui consentent à m’obéir.
Je suis douée,
j’écris de grands poèmes.
J’entends des voix
aussi bien que des saints très sérieux.
Vous seriez étonnés
de ma vélocité au piano
Je vole comme il se doit,
c’est-à-dire par moi-même.
Tombant du toit,
je sais tomber mollement dans la verdure.
Je n’ai aucun mal
à respirer sous l’eau.
Je ne me plains pas :
je suis parvenue à découvrir l’Atlantide.
Je me réjouis de savoir
me réveiller toujours avant la mort.
Sitôt la guerre éclatée
je change de côté.
Je suis, mais sans être obligée,
un enfant de mon époque.
Il y a quelques années
j’ai vu deux soleils.
Et, avant-hier, un pingouin.
Parfaitement, comme je vous vois.
traduit du polonais par Piotr Kaminski
in Je ne sais quelles gens (Fayard, 1997)